La controverse autour du projet de loi sur la sécurité au Soudan du Sud, permettant l’arrestation des individus sans mandat, a pris une tournure décisive alors que cette loi est désormais en vigueur, malgré l’absence de signature du président Salva Kiir.
Le porte-parole du parlement, Oliver Mori, a confirmé jeudi à AP (Associated Press) que la loi est entrée en vigueur « automatiquement » conformément à la constitution, après un délai de 30 jours depuis sa présentation au président le 12 juillet dernier.
Ce dernier n’a ni signé ni opposé son veto à cette loi, ce qui a suscité des critiques virulentes de la part des activistes des droits de l’homme ainsi que de plusieurs pays.
Neuf envoyés occidentaux, incluant des représentants des États-Unis et de la Grande-Bretagne, ont exprimé en juillet leurs préoccupations, affirmant que les citoyens sud-soudanais devraient pouvoir participer librement à la vie politique et civique sans craindre des arrestations arbitraires ou des intimidations de la part des forces de sécurité.
Cette situation prend une dimension particulière à l’approche des élections prévues pour le 22 décembre prochain, les premières sous le gouvernement de transition mis en place après l’accord de paix de 2018, qui avait mis fin à une guerre civile de cinq ans ayant causé la mort de près de 400 000 personnes.
La nouvelle loi est devenue un point de friction majeur dans les discussions entre le gouvernement et les groupes d’opposition non signataires de l’accord de paix de 2018.
Yasmin Sooka, présidente de la Commission des droits de l’homme de l’ONU au Soudan du Sud, a exprimé jeudi ses inquiétudes, déclarant que cette loi donnerait aux agences de sécurité le pouvoir d’effectuer « davantage de détentions arbitraires et de disparitions forcées ».
« Nous exhortons le président et le parlement à revoir d’urgence la situation et à réviser la loi conformément aux processus démocratiques, afin de renforcer la crédibilité et la légitimité du gouvernement. L’adoption de cette loi va à l’encontre des engagements pris par le Soudan du Sud envers la communauté internationale et son propre peuple », a-t-elle ajouté.
Ter Manyang Gatwech, directeur exécutif du Centre pour la Paix et le Plaidoyer, un groupe local de défense des droits, a promis de contester cette loi devant les tribunaux.
« Cette loi constitue une menace directe pour la nation, et par conséquent, personne n’est en sécurité dans ce pays à cause de sa nature », a-t-il déclaré à AP.
Le mois dernier, le porte-parole du département d’État américain, Mathew Miller, a rappelé que le gouvernement de transition du Soudan du Sud doit agir de toute urgence pour créer un environnement dans lequel les citoyens peuvent exprimer leurs opinions ouvertement et sans crainte.