Dans un Burundi où le pluralisme politique se réduit comme peau de chagrin, la reconduction de Daniel Gélase Ndabirabe à la tête de l’Assemblée nationale sonne comme un rappel : ici, le pouvoir ne partage rien, pas même les apparences.

Ce 31 juillet, dans l’hémicycle de Kigobe à Bujumbura, le vote a été sans suspense : 109 députés sur 111 ont validé un nouveau mandat de cinq ans pour celui qui dirige déjà la chambre basse depuis 2020.

Le bureau parlementaire est resté dans la même logique : Fabrice Nkurunziza hérite du poste de premier vice-président, Boussessia Nkezimana décroche la seconde vice-présidence, tous deux élus presque à l’unanimité.

Un casting sans aspérité, à l’image de la discipline de vote imposée au sein du parti au pouvoir.

Car au-delà des chiffres, cette réélection illustre la mainmise du CNDD-FDD, au pouvoir depuis près de vingt ans.

Proche parmi les proches du président Évariste Ndayishimiye, Daniel Gélase Ndabirabe reste un pilier du dispositif présidentiel.

Son rôle au sein du conseil des sages du CNDD-FDD en fait un acteur clé de la continuité politique.

Pourtant, le climat autour de ce renouvellement de mandat est tout sauf serein.

La réputation de Ndabirabe est ternie par de récentes décisions contestées : l’éviction forcée de deux commissaires de la Commission Vérité et Réconciliation (CVR), soupçonnés de connivence avec Kigali, a conduit ces derniers à fuir le pays.

Des accusations que certains qualifient de prétextes politiques destinés à museler toute voix dissidente.

Même scénario à la Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH), où la nouvelle équipe est jugée inféodée au pouvoir, tandis que son ancien président a dû prendre le chemin de l’exil.

À ces controverses institutionnelles s’ajoutent des prises de position publiques pour le moins radicales.

Ndabirabe s’est illustré par des propos particulièrement sévères à l’égard des commerçants accusés de contrebande de carburant, n’hésitant pas à réclamer des mesures extrêmes, telles que l’amputation ou le retour de la peine capitale.

Un discours à la tonalité populiste, qui, au-delà du choc qu’il suscite, en dit long sur la stratégie d’intimidation et de contrôle social.

La reconduction de ce fidèle parmi les fidèles traduit donc une double dynamique : la consolidation du parti de l’Aigle autour de figures réputées loyales, et le durcissement d’un régime de plus en plus imperméable aux critiques.

Alors que la crise énergétique dure depuis plus de quatre ans et que l’opposition peine à exister, l’Assemblée nationale, loin d’apparaître comme un contre-pouvoir, s’affirme comme un relai docile des orientations de l’exécutif.